“Le parc national des Virunga, situé dans l’est de la RDC (République démocratique du Congo), est un patrimoine mondial de l’UNESCO, un site Ramsar et le plus ancien parc national d’Afrique. Le parc a une valeur universelle incroyable pour sa biodiversité et sa beauté naturelle, et abrite l’une des dernières populations de gorilles de montagne de la planète.

Les Virunga abritent également de vastes quantités de ressources naturelles, notamment du pétrole inexploité qui pourrait faire de la RDC le deuxième producteur de pétrole d’Afrique subsaharienne. La région a également connu une histoire douloureuse et des conflits et guerres civiles permanents, ce qui rend la protection du parc à la fois difficile et dangereuse. 

La RDC est l’un des pays qui a le moins contribué aux émissions mondiales de carbone, mais qui en subira le plus les conséquences par la hausse des températures, l’augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes, l’insécurité alimentaire et les risques pour la disponibilité de l’eau.

Pour explorer ce sujet, nous avons pris contact avec l’incroyable activiste et militant Pascal Mirundi du groupe Extinction Rebellion Université de Goma (Université de Goma), pour lui demander quelle est la situation, ce que font les activistes locaux et ce que nous pouvons faire pour aider. “

Quelle est la situation actuelle de l’exploration pétrolière en RDC et dans le parc national des Virunga ?

“Entre 2005 et 2010, le gouvernement congolais, à travers le Ministère des hydrocarbures, a approuvé des contrats de concession pétrolière en faveur d’entreprises étrangères de combustibles fossiles comme Efora, Total, Socco, Dominion Petroleum en vue de l’exploration et de la réalisation de tests sismiques. Cette démarche est contraire à l’Ordonnance-loi 69-041 du 22 août 1969 sur la conservation de la nature et aux conventions internationales ratifiées par la République démocratique du Congo .

En 2019, le groupe pétrolier TOTAL détenait un permis de recherche de pétrole près du parc des Virunga, plus vieux parc naturel d’Afrique, situé à l’est de la République Démocratique du Congo et malheureusement nous ne savons pas si le contrat a été résilié car sur ce sujet nos autorités sont en silence radio.

Le parc national des Virunga est une réserve de biodiversité, un refuge pour les gorilles et les éléphants. Mais son sous-sol abrite des réserves pétrolières qui intéressent les compagnies du monde entier, au lieu d’être une source de joie nous commençons à avoir peur qu’elle soit une source de souffrance car bon nombre de multi-national veulent l’exploiter. Si Total détient un permis de recherche qui couvre en partie une zone du parc, presque 21.5% du parc sera en péril car ils vont le déboiser, sans oublier que dans le passé précisément en 2009 la RDC a donné des permis d’exploration couvrant 85 % de la superficie du parc au bénéfice de Total, Eni et SOCO International (Royaume-Uni), alors que la loi congolaise interdit toute exploration dans les montagnes des Virunga, Les deux dernières compagnies ont assuré qu’elles ne s’aventureraient pas dans la réserve, mais la première veut toujours y pénétrer, avec déjà l’attribution de permis d’exploitation par les gouvernements voisins, cas du Tanzanie et de l’Ouganda nous craignons que les autorités congolaises fassent la même chose.”

Comment l’extraction du pétrole pourrait-elle affecter les personnes vivant dans et autour des Virunga et les écosystèmes qui s’y trouvent?

“Les effets de la pollution peuvent atteindre facilement les écosystèmes du parc des Virunga et si les eaux de la rivière Semliki devenaient polluées, ça serait toute l’hydrographie même du bassin qui serait affectée.

Pour nous, l’exploitation pétrolière ne détruira pas seulement ces écosystèmes, cela affectera aussi les communautés qui en dépendent pour leur survie, en particulier ici en Afrique, où les activités pétrolières n’ont cessé d’être la cause de dégâts environnementaux, de violations des droits humains et ont alimenté des conflits avec, entre autres conséquences, des exécutions extrajudiciaires. Les énergies fossiles sont les plus grosses sources d’émissions de gaz à effet de serre. En tant que signataires de l’accord de Paris, nos dirigeants devaient s’engager à limiter les activités responsables de ces émissions polluantes.”

Que diriez-vous aux personnes qui affirment que l’extraction du pétrole apporterait de l’argent à la population locale et à la région?

“Ces personnes n’ont pas tort, l’extraction va apporter de l’argent mais a qui? Et pour faire quoi?

Mon pays la RDC a de multiples ressources minières comme :

La République démocratique du Congo a la septième réserve de lithium dans le monde (dans un classement dominé par des pays d’Amérique du Sud) avec des ressources estimées à près de trois millions de tonnes. À l’instar du cobalt, le lithium est un composant essentiel des batteries et véhicules, ordinateurs et téléphones portables.

Le coltan se trouve en grande quantité en RDC dans la région du KIVU qui détient entre 60 et 80 % des réserves mondiales. Selon les données de la Chambre des mines, la RD Congo a produit en 2016, 869 tonnes de coltan, en baisse de 12 % par rapport à 2015 (992 tonnes) et tant d’autres.

Sur le plan économique, malgré 90000 tonnes produits par exemple en 2018, les trois quarts de la population congolaise vivent avec moins de 1,9 dollars par jour.

La réglementation de l’industrie minière est pratiquement inexistante dans mon pays, et les institutions sont très faibles. Cela entraîne une corruption généralisée, des nombreuses fraudes, et des contrats léonins d’ailleurs très favorables aux multinationales étrangères et nous savons que des choses similaires pourront se répéter s’ils exploitent le pétrole du parc national des Virunga. Regardons dans la province de Bas-Congo précisément à MUANDA, la compagnie Franco-britannique PERENCO exploite le pétrole depuis 2001 mais la vie de la population riveraine reste déplorable.

Aussi nous devons être capable de faire la part des choses entre les 10 milliards de dollars qu’ils peuvent donner avec l’avenir de notre Monde. Le parc national des Virunga est l’un des poumons mondiaux qui nous donne de l’air frais et qui combat le réchauffement climatique.

Si nous pouvons encore une fois oublier nos intérêts égoïstes et accepter d’offrir à l’humanité entière la grâce de vivre, cela nous serait juste car, cela s’explique par notre principe d’UBUMTU.”

Pouvez-vous nous parler de votre groupe de campagne et des actions et activités que vous avez menées jusqu’à présent?

“Extinction rébellion université de Goma depuis déjà 2 ans, nous menons des actions de mobilisation pour conscientiser les populations sur les dangers de l’exploitation du pétrole du parc national des Virunga sur tous les plans, que ça soit sur le plan économique, social, environnemental nous ne voyons pas de mesures responsables et efficaces qui peuvent rassurer toute l’humanité que ces boules d’énergie ne va pas disparaître.

-nous avons lancé des activités pour parler avec les communautés riveraines dans le RUTSHURU, nous avons lancé des activités d’échange dans des universités et écoles à Goma, nous sommes partis dans des points chauds de la ville comme des marches pour parler avec toutes les bases sociales.

-nous menons des activités d’éveil citoyen pour amener cette population à comprendre sa vraie place dans la prise des décisions ainsi que pour booster nos autorités à prendre de bonnes décisions car chaque population mérite ses dirigeants, nous organisons des visites citoyennes, des marches pacifistes, des sit-in, des performances artistiques pour amener nos dirigeants à prendre conscience mais aussi prendre des bonnes décisions parce que, étant nos représentants nous avons le pouvoir de les sanctionner s’ils n’arrivent pas à prendre des mesures qui nous assurent un avenir meilleur.

Il serait tellement décevant qu’un jour nous soyons incapable de répondre à nos enfants qui voudrons savoir où sont partis les gorilles de montagne qui vivent aujourd’hui dans parc des Virunga.”

Quelles actions envisagez-vous pour l’avenir?

“Nous sommes toujours en pleine mobilisation des alliés et nous comptons faire des actions au niveau mondial avec différentes organisations, associations et mouvements pour demander :

-A l’opinion de comprendre les dangers que risque notre écosystème,

• Mettre pression aux décideurs internationaux pour qu’ils arrivent à prendre des bonnes décisions environnementales,

• Mettre pression à l’Etat congolais qui jusqu’à aujourd’hui aimerait donner des permis d’exploitation aux entreprises et les pousser à se prononcer en résiliant officiellement  tous les contrats déjà signé mais aussi avoir un cadre juridique clair interdisant tout accès aux entreprises pétrolières dans tous les parcs de la Rdc

  • Mettre pression à Total,EFORA,SOCO qui aimeraient exploiter le parc national des Virunga pour qu’ils puissent se prononcer et mettre fin à ses lobby.

La non violence étant une lutte, pour la remporter, il faut se faire des alliés, nous voulons faire des rencontres avec les populations riveraines mais aussi avec les décideurs aussi bien au niveau provincial que national, faire des rencontres avec des députés pour leur parler de notre point de vue sur cette question de l’exploitation du pétrole du parc de virunga  mais aussi arriver à avoir un plan de gestion participative entre la population et  ICCN qui représente l’Etat congolais de tous les parcs de la Rdc, leur présenter notre cahier des charges qui sera conçu avec les populations riveraines, se voir avec la ministre nationale de l’environnement, le ministre de l’hydrocarbure pour parler avec eux des effets de l’exploitation du pétrole et le manque d’une gestion participative qui se voit autour de tous les parcs de la Rdc.

Pour la réussite de cette action il nous faudra faire une grande mobilisation et avec le crowdfunding que nous allons initier, le fond nous aidera à réaliser nos séances de lobby auprès des dirigeants.”

Que peuvent faire les habitants du reste du monde pour aider? 

“Le parc national des Virunga n’est pas seulement attaqué par les exploitants des matériaux de sous-sol, le parc national des Virunga est attaqué par un manque de politique de gestion participative, qui doit exister.

Si nous devons protéger cette réserve, nous devons accepter qu’il y a deux choses qui ne peuvent jamais être dissociées “l’environnement et la population” ; ils sont deux et existent toujours ensemble. Nous ne pouvons pas prétendre protéger le parc national des Virunga si nous ne voulons pas répondre aux demandes claires des populations riveraines du parc. 

Cette population souffre, avec de multiples guerres, avec un taux de misère si élevé que l’on croit que cette population est effacée sur la liste de la population mondiale.

Nous demandons à l’opinion nationale et internationale de se souvenir qu’il y a une population qui a accepté de laisser ses terres arables pour que notre avenir soit rassuré et il est décevant de voir que les pays pollueurs n’arrivent pas à payer leurs dettes et que le peu qui peut être envoyé ne profite qu’à une poignée de personnes. Nous demandons donc aux pays signataires de la Convention-cadre des Nations Unies contre le changement climatique, lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, de mettre en place un cadre qui puisse répondre aux besoins des personnes vivant le long de la côte.

Nous demandons aux organisations environnementales mondiales de faire preuve de solidarité car, seuls, nous n’arriverons à rien.”

#SoyezCurieux! Que puis-je faire pour aider?

  • Regardez cette vidéo youtube sur Fossil Free Virunga avec les activistes de XR Université de Goma, Pascal et Antoine.
  • Suivez XR Université de Goma sur Facebook, Instagram et Twitter.
  • Signez la pétition de 350.org disant non à l’exploitation pétrolière dans les Virunga.
  • Faites un don pour aider la campagne du groupe – restez à l’écoute pour une page de crowdfunding!

A propos de Pascal :

Pascal est un étudiant en droit de l’Université de Goma, voici son histoire sur son implication avec XR Université de Goma.

“Notre pays traverse aujourd’hui plusieurs crises depuis 1994, des multiples guerres, des intrusions des groupes armés, etc.

En 2016, lorsque j’avais encore 17 ans, la Rdc traversait une crise, le président KABILA venait de clisser au pouvoir encore une fois parce qu’il ne voulait pas organiser les élections, des multiples soulèvements populaires se sont organisés et à cette époque une terreur s’installât, à BENI dans la province du nord KIVU, des massacres vus jour, un groupe de soit disant ADF-NALU tue la population par machette, incapable de rester silencieux devant de telles injustices, souffrances sans fin. Je suis entré dans la LUCHA (lutte pour le changement) un mouvement citoyen congolais qui est non violent, non partisan, qui pense que pour changer le Congo, la population doit être exigeante vis-à-vis de ses dirigeants, car chaque population mérite de bon dirigeants.

Le mouvement LUCHA créé à Goma en 2012 par des jeunes étudiants, a choisi la non violence après avoir compris que la violence n’est qu’un cercle interminable, la violence ne donne que la violence surtout dans un pays où tout se gère que par la violence.

Ce mouvement fut ma toute première école en citoyenneté et grâce à elle j’ai découvert le pourquoi de ma venue sur terre qui est la protection de l’écosystème. Cet écosystème a besoin que nous la rendions mieux de nous, la protéger, la conserver, l’aimer, la chérir parce qu’elle est la condition sine qua none de notre vie.

Cette lutte sur l’environnement, elle est multidimensionnelle car même l’existence de nos enfants est accrochée à cette lutte, il y a des fois où je me dis que s’il faut un jour léguer une chose d’importance capitale à nos enfants, la première serait cet écosystème sain.”

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